Discriminations, je peux agir !

"Je peux gir!". Une campagne contre toutes les discriminations et le harcèlement.

 

Traiter des discriminations par l’image n’est pas chose aisée. Sujet que le groupe de travail constitué par l’ANdÉA (Association nationale des écoles supérieures d’art) sait hautement délicat. Hautement délicat en plusieurs endroits. Le premier, d’abord, est celui de la multiplicité des formes de la discrimination auxquelles s’adjoignent, second point, les registres de la discrimination.

Au nombre de 20, ces items que la loi définit comme punissables dès lors qu’elle est saisie, comprennent l’âge, l’apparence physique, l’appartenance ou non à une ethnie, à une nation, à une race, à une religion déterminée, l’état de santé, l’identité sexuelle, l’orientation sexuelle, la grossesse, le handicap, le patronyme, le sexe, les activités syndicales, les caractéristiques génétiques, les mœurs, les opinions politiques, l’origine et le lieu de résidence. Cette litanie génère autant de points d’entrée à des comportements nuisibles, si l’on n’y prend garde, dès lors qu’une ascendance est opérée.

Signataire de la charte contre les discriminations et le harcèlement, approuvée par l’Assemblée générale de l’ANdÉA le 30 mars 2015 à partir du travail de la commission Organisation et vie des écoles, l’École supérieure d’art de Cambrai – comme toutes les écoles du réseau de l’ANdÉA -, dans le cadre de ses instances, veille au respect de ces recommandations incitatives qui m’apparaissent comme une obligation nécessaire, normale. Normale dans l’acception d’un degré zéro, préalable évident pour nos étudiants interrogeant l’espace personnel mais surtout, pour paraphraser la charte sus-citée, parce que nos établissements doivent être « des espaces de construction et d’affirmation de l’identité de chacun ».

Le troisième endroit est la difficulté sur un format restreint d’écarter de fait, du champ, l’un des items discriminatoires, mais surtout d’établir une justesse de l’adresse.

À l’issue d’un atelier réunissant étudiant.e.s de l’Institut supérieur des Beaux-Arts de Besançon et de l’École supérieure d’art de Cambrai, fut retenue, après sélection de propositions rendues anonymes, une série de 3 images d’apparence amicale. Un rapide examen de chacun des éléments constitutifs de ces tracts permettra d’établir qu’il n’en est rien.

Ainsi apparaît, sous la pression du co-texte, un chapelet d’injures. Un chaton, un escargot, quelques pattes, une ampoule électrique… Rien de bien méchant en soi, si ces éléments étaient isolés, mais qui dans une lecture associative déploient toute leur violence. Violence à laquelle nous avons, je le crains, été victimes ou témoins.

Ma lecture de ces imprimés est tout à la fois qu’ils s’adressent aux personnes qui sont victimes ou témoins de faits discriminatoires, mais aussi qu’ils signifient aux personnes malveillantes, nuisibles sous couvert de la blague de grognards, de potache, que la chose n’a rien d’amusante mais qu’elle constitue bien un acte de violence. Ces objets imprimés qui peuvent donc prêter à sourire de prime-abord dans leur apparente désinvolture mettent en évidence toute la violence de l’insulte et de la discrimination. Avec quelques exemples – pour certains historiques, pour d’autres encore actuels -, ils parviennent à faire référence à la discrimination quelle qu’elle soit et, par la répétition du modus operandi, à tous les actes de harcèlement.

Je n’ai aucune naïveté sur la portée de ces imprimés seuls qui, dans leur esthétique, propos, angle d’attaque, feront à coup sûr débat, mais ils participent à une action, à une réflexion plus globale articulée par cette charte, signifiant que nous sommes attentifs à cette question – directions générales, enseignant.e.s, étudiant.e.s – et que nous agirons depuis l’endroit de nos établissements.

Pour les victimes et témoins, j’espère en toute sincérité que ces imprimés les inviteront à se mettre en relation avec les instances dont disposent les établissements, à trouver des interlocuteurs qui se saisiront des situations, et à permettre de constituer ces instances et relais s’ils n’existent pas encore au sein de leur Conseil d’Orientation Scientifique, Pédagogique et de la Vie Étudiante (COSPVE).
Pour les affreux leur signifier que la chose n’a rien d’amusante, ni d’anodine et encore moins d’insignifiante, qu’il faille que leurs saillies cessent.

Jean-Michel Géridan.